Depuis le début de l’hiver, beaucoup s’en plaignent, la neige fait défaut dans les Vosges et par conséquent sur les pistes de ski. Tout d’abord remettons les pendules à l’heure, les Vosges ont connu par le passé des hivers sans neige ou presque, et en connaîtront sans doute beaucoup d’autres. Cela a des conséquences évidentes sur l’activité des stations de ski et, par ricochet sur le revenu de ceux qui y travaillent. Certains n’ont pas été embauchés, d’autres sont au chômage technique.
Que les salariés saisonniers des stations soient accompagnés financièrement par la mobilisation des dispositifs existants, (chômage technique, aides sociales diverses..) cela est tout à fait normal. C’est le résultat d’un système de protection sociale, fondé sur la solidarité, hérité du programme du Conseil National de la Résistance intitulé « Les jours heureux ». Cet héritage est aujourd’hui mis en cause et menacé dans son existence. Sans ce principe de solidarité, de nombreux salariés vivraient demain dans une précarité encore plus grande.
En revanche, que les exploitants des stations de ski qui ont fait de très gros bénéfices depuis plusieurs années, grâce à des enneigement exceptionnels, viennent toute honte bue à la première alerte, frapper à la porte du Préfet pour que ce dernier ouvre sa tirelire, alimentée tout de même par nos impôts, c’est, le mot n’est pas trop fort, indécent.
Ceux-là mêmes et leurs représentants qui par ailleurs, considèrent toujours qu’ils payent trop de charges, comme ils disent, et trop d’impôts, sont les premiers à se précipiter pour quémander des aides publiques afin de sauver leurs profits privés. Si on les écoute et si on les comprend bien, ce sont : les bénéfices pour ma poche et les déficits pour le public. Cela s’appelle aussi privatiser les bénéfices et socialiser les pertes. Ils en ont tellement l’habitude, qu’ils n’ont plus la moindre honte et affichent publiquement leur impudence dans la presse. Ils ont même l’aplomb de présenter leur mendicité comme étant favorable aux salariés, donc à l’emploi. C’est à la mode actuellement de se réclamer de l’emploi. En son nom tout devient possible et surtout les plus grosses manipulations.
Oui, Mesdames et Messieurs votre attitude est indécente.
Elle est indécente, parce que vous êtes les premiers à claironner qu’il faut diminuer les dépenses sociales (trop de charges), et les dépenses de l’état (trop d’impôts). Vous êtes cependant les premiers à pleurer auprès de ce même Etat pour qu’il vous vienne en aide, et avant même que votre activité ne soit véritablement affectée. Il faudrait selon vous que vos bénéfices soient garantis par l’Etat et l’argent public… Pas de neige, donc des subventions, moins de clients, donc des subventions !
Elle est indécente, parce que vous tentez de vous cacher derrière les difficultés de vos salariés, pour justifier des demandes d’aides qui ne profiteront qu’à vous et à la sauvegarde de vos bénéfices.
Elle est indécente, parce que votre course en avant à toujours plus d’aménagements, à toujours plus d’investissements, a ignoré et dédaigné les avertissements lancés par quelques uns, sur la faiblesse et l’irrégularité croissante de l’enneigement du massif vosgien, et sur les risques inhérents au sur-dimensionnement des équipements.
Elle est indécente, parce qu’elle est moralement injustifiable. Mais je vous parle de morale, je ne sais pas si vous connaissez le sens de ce mot. Ne le cherchez pas dans la colonne bénéfice de votre compte d’exploitation. Déplacez votre regard et tentez d’appréhender la réalité du monde qui vous entoure. Observez les humains et la nature, observez les valeurs qui s’en dégagent et qui font de ce monde un lieu où la vie est encore possible. Peut-être alors, j’en forme le vœu, vous commencerez votre « chemin de Damas ».
Vosges Matin du 20 janvier 2014