Je souhaiterais tirer un feu d’artifice pour l’anniversaire de ma nièce. Comme j’ai pu le constater, cela est possible à partir du stade des Champions, et cela tombe bien, je réside à proximité immédiate de cet équipement. Ce qui m’a permis de profiter samedi 03 juillet dernier d’un feu d’artifice imposant tiré vers 23h30. C’est une excellente idée d’avoir autorisé cette manifestation sur ce site, visible des deux versants, ce qui ouvre la possibilité à tous les résidents permanents ou occasionnels des hauteurs et pourquoi pas de la vallée de fêter dignement les anniversaires, communions, départs à la retraite, pendaison de crémaillère, réussite du petit dernier au bac, etc, en tirant ou faisant tirer un feu d’artifice pour célébrer l’événement. Je souhaite toutefois vous alerter sur le fait suivant : il n’y a que 52 week-end dans l’année ce qui limite les possibilités, – si l’on considère que les fêtes familiales se déroulent généralement les vendredis et samedis soirs, ainsi que les jours fériés en semaine, – à un peu plus d’une centaine de créneaux par an. C’est la raison pour laquelle j’anticipe et vous sollicite afin de réserver un samedi soir du mois d’août. Le feu d’artifice que je compte offrir à ma nièce, et accessoirement à tous les Bressauds, ne durera pas plus de 20 minutes et sera tiré par un professionnel, sur le stade aux alentours de minuit.
Mais trêve de galéjades, ce feu d’artifice sauvage n’est que la partie émergée de l’iceberg des incivilités qui vont grandissantes d’année en année et qui connaissent leur point culminant pendant les week-end et les périodes de vacances : cyclistes, VTT, trottinettes électriques roulant à grande vitesse sur les trottoirs, voitures garées n’importe où, musiques tonitruantes dans les locations jusque tard dans la nuit, bandes d’individus fortement alcoolisés déambulant en braillant sur la voie publique et insultant les riverains qui osent leur faire des remarques etc.
La Bresse et le massif des Vosges se transforment en un terrain de jeu, un nouveau Disney-land entièrement consacré aux jeux et aux plaisirs égoïstes, toujours coûteux, toujours imbéciles, nécessitant des équipements toujours plus invasifs, polluants, bruyants, destructeurs des paysages. Un vrai tourisme familial, respectueux de la nature, si l’on en croit les communications envahissantes des offices de tourisme ! ?
Avec le « tourisme quatre saisons » nouveau mantra, désormais inlassablement psalmodié et répété par tous les élus des Vosges qui donnent l’impression d’avoir redécouvert l’eau tiède, tout cela ne fera que s’amplifier, jusqu’à transformer les locaux en indigènes à pompons à qui l’on balance des cacahuètes.
Tout ceci n’est pourtant pas nouveau, de nombreuses alertes ont été lancées : des courriers ont été adressés aux élus, des dérives et incivilités signalées sans que cela n’entraîne la moindre réaction de ceux-ci ni des autorités. Il n’y eu qu’une seule et même réponse que l’on peut résumer ainsi, le touriste est roi et rien ne doit être fait qui puisse ralentir et contrarier son plaisir1.
Dans la commune voisine de Gérardmer, les mêmes phénomènes sont à l’œuvre. Des associations et des collectifs de riverains exaspérés se mobilisent et tentent d’agir pour retrouver une qualité de vie normale. Ils sont toutefois confronté à ce douloureux dilemme : comment bénéficier de l’argent des touristes sans les touristes et les nuisances qu’ils provoquent ?
Cette question se pose également à La Bresse où beaucoup de locaux souhaitent continuer à bénéficier du revenu touristique, tout en déplorant le trop grand nombre de touristes. Question sans issues ? Jusqu’au jour pas très lointain où plus aucun Bressaud n’aura moins de 60 ans, qu’aucun jeune couple ne pourra acquérir ou louer un logement, en raison de prix exorbitants comme c’est déjà le cas, que 80 % des logements seront des résidences secondaires, que les commerces n’ouvriront qu’aux périodes touristiques, que les dernières écoles fermeront suivie par la poste. Ce jour, d’autant plus proche, qu’aucune prise de conscience sérieuse ne semble se dessiner, marquera l’aboutissement d’une longue période d’imprévoyance et d’insouciance par un réveil brutal et peut-être inutile car ayant trop tardé.
Le 9 juillet 2021
Dominique Humbert-Beretti alias Gracchus
1Le projet démesuré de rond point au carrefour des Champions à La Bresse est une illustration de cette pensée magique déconnectée de toute réalité : un rond point inutile mais très coûteux (1,2 millions d’Euros d’argent public prévu …) va être construit en pleine ville, enjambant deux fois la rivière, pour soi-disant éviter quelques secondes d’attente aux malheureux touristes qui descendent du Massif par l’une ou l’autre vallée ! A cet argumentaire piteux doit évidemment être associé une raison masquée : faire travailler les entreprises de travaux publics et peu importe l’utilité des travaux. Nous reviendrons sur cette ineptie lors d’un prochain article.