A la Bresse, ce vendredi soir avait lieu un débat organisé par la municipalité dans le cadre du Grand débat national. C’est le second débat auquel j’assistais, le premier s’étant tenu à Epinal. On peut regretter qu’à la Bresse un nombre restreint de personnes s’y soient exprimées, alors que c’est bien l’objet de ces réunions que de le faire. Crainte de prendre la parole en public, de se faire mal voir, de n’avoir rien à dire etc. c’est bien dommage. Aussi quand certains ont reproché à ceux qui s’exprimaient de monopoliser la parole, on a atteint des sommets dans la mauvaise foi ! La parole était libre que n’en ont-ils profité ? En réalité on le constate une fois de plus, non la parole est loin d’être libérée pour la majorité des gens. Peu d’interventions sur les problèmes de fond de notre société, en revanche quelques timides propositions de rapiéçages, de pansements sur une jambe de bois, une fois encore nos concitoyens espèrent des améliorations s’ils jouent le jeu, croyant à la poupée qui tousse, qui tousse depuis des décennies sans jamais guérir :
« Voilà des gens qui, une génération après l’autre, auront vu leur condition de salariés moyens perdre toujours davantage ses droits, ses protections, ses rémunérations, du fait de politiques visant à récupérer sur le dos des travailleurs toujours plus de plus-value pour rémunérer les grands investisseurs et autres pirates bancaires bénéficiaires des intérêts exorbitants, indécents, de la dette publique. Les classes moyennes voient tout cela, depuis longtemps, mais elles n’ont toujours pas compris, parce qu’elles ne veulent pas comprendre et continuent à s’en remettre du soin de les gouverner à des créatures du système, à tous les niveaux.[……]La capacité de la classe moyenne à se reproduire à chaque génération avec les adaptations nécessaires, est intimement et circulairement liée à celle du système capitalisme et à sa logique salariale d’asservissement, de collaboration et de séduction. Trop d’intellectuels qui se disent dans l’opposition politique croient qu’il suffit pour combattre le système d’aller dévotement mettre, en manière d’exorcisme, un bulletin dans une urne électorale[…..] Il ne s’agit pas simplement de combattre, le temps d’une campagne électorale…les politiques des partis de gouvernement […..]comme s’il était encore possible de croire aujourd’hui que le capitalisme est réformable de l’intérieur, en réduisant la lutte politique et sociale aux consultations électorales et les élections aux sondages d’opinion. ».
Extraits de La chronique d’Alain Accardo – Journal La décroissance février 2019
Effectivement, on retrouvait dans la salle cet état d’esprit à la Bresse (comme à Epinal ): soumission à l’ordre établi, croyance naïve dans les effets d’annonce et les promesses pourtant jamais tenues des pouvoirs en place. Sans doute et je m’en attriste beaucoup, un aveuglement plus facile à vivre qu’un combat à mener chaque jour. A la fin de la réunion, un macronien convaincu a voulu m’assommer d’un : « Vous, vous êtes contretout !», la phrase censée tuer quand on manque d’arguments, véritable cliché à La Bresse qui va de pair avec le sempiternel : « Vous polémiquez !», qu’on a d’ailleurs pas entendu ce soir-là. Heureusement, je suis immunisée. Contrairement à ce que mes détracteurs pensent, je suis pour la liberté, pour l’égalité, pour la fraternité, pour la justice sociale, pour la solidarité des plus forts envers les plus faibles, pour la protection de la nature et de l’environnement, pour la biodiversité …Sans aucun doute nous ne nous battons pas pour les mêmes pour !
Ci-dessous, le texte que j’ai lu devant l’assemblée vendredi dernier, légèrement amendé.
« Grand déballage national »
Depuis le 15 janvier dernier, beaucoup s’accordent à remarquer qu’en réalité nous n’assistons pas à un grand débat national prenant en considération l’intérêt général, mais davantage à un catalogue interminable, d’idées, de propositions souvent contradictoires entre elles, d’ailleurs.
Le grand débat part dans tous les sens mais n’était-ce pas à prévoir, se transformant au fil des réunions en un grand déballage national. Il risque aussi de mal finir car il ne suffit pas d’écouter les doléances, il faudra ensuite concrétiser et apporter des réponses pertinentes : ou alors ce qu’on nous propose là, est un débat qui compte pour du beurre, pour amuser la galerie. Le Président Macron dans son rôle d’animateur/bateleur n’abuse plus grand monde avec ces pathétiques tours de passe-passe, ni les Gilets Jaunes, ni les Français qui continuent de les soutenir massivement.
N’est-il pas pour le moins inquiétant de voir un Président de la République et quelques-uns de ses ministres, sillonner la France pour aller à la rencontre des Français (élus et citoyens) afin d’écouter leurs doléances ? Il me semble qu’ils l’avaient déjà fait lors de leurs campagnes électorales…Et depuis qu’ils sont au gouvernement à quoi ont-ils donc oeuvré ? Ont-ils été aveugles et sourds depuis deux années d’exercice du pouvoir ? Je crains bien que oui.
Le soi-disant « Grand-débat national » est une fumisterie, une de plus, il s’agit clairement d’une nième manipulation du pouvoir en place, de la COM comme ils l’avouent, déclarant « on n’a pas bien communiqué sur nos projets»comme s’il s’agissait de cela ! Il a fallu que le peuple, les citoyens revêtant des gilets jaunes descendent dans la rue et fassent entendre un ras le bol généralisé. Alors, miracle E. Macron et son gouvernement prennent conscience, d’un coup, que tout ne va pas pour le mieux au royaume de France, qu’il y a des mécontents et de graves problèmes : les chômeurs, les précaires, les retraités, la jeunesse, le pouvoir d’achat, la santé publique avec les hôpitaux et les EHPAD etc. Les Gilets Jaunes ont dressé un inventaire des problèmes, effarant et terrible inventaire pour ceux qui nous gouvernent, ceux d’aujourd’hui mais aussi ceux qui les ont précédés. Le constat est implacable : ils sont aux affaires et n’ont rien vu, rien entendu ou plutôt rien voulu voir, rien voulu entendre ! Quelle hypocrisie, quelle arrogance de la part de la classe politique.
Mais n’acceptons plus d’être leurs dupes et ne nous laissons pas berner par leur pseudo grand débat. Les Français n’ont que faire d’un état des lieux, nous connaissons tous la situation de notre pays, ce que nous devons exiger ce sont des changements, ce vieux système capitalisme est à l’agonie. Cette république d’élus, censés nous représenter qui en fait, nous méprisent est moribonde. Les élus dans leur grande majorité, nous mentent depuis des décennies, nous exploitent et nous rackettent à présent, en nous écrasant sous leurs taxes. Depuis plus de deux mois, des femmes et des hommes que l’on dit d’en bas (mais pas seulement) ont occupé les ronds-points, la rue pour crier leur révolte devant l’injustice qui leur, qui nous est faite : nous assistons au combat des Communards et des Versaillais, des faibles contre les puissants, des exploités contre leurs exploiteurs, tout simplement à la lutte des classes toujours d’actualité.
Débattons entre citoyens, refusons des thèmes encore une fois imposés d’en haut, débattons librement sur le fond. Sans hauteur de vue dans le débat, nous allons privilégier les intérêts particuliers (résoudre des problèmes personnels) alors que c’est l’intérêt général qu’il faut prendre en compte. Gardons bien en tête que le but non avoué de ces débats, n’est pas de répondre aux justes revendications, mais de le rendre inopérant par l’absence de mise en perspective des propositions. Si nous acceptons de jouer le jeu avec leurs cartes alors, une fois de plus nous serons floués : prenons nos vies en main, nous en avons le droit et l’entière légitimité.
Le 11 février 2019
Annie Aucante